Le texte qui suit est une forme "d'audition d'expert" pour le programme de campagne de Charlotte Marchandise, candidate citoyenne de "la primaire.org".
https://medium.com/@charlottemarchandise/la-santé-est-aussi-un-enjeu-mondial-b2fe27180813#.kiw6o6rxq
La France n’est pas une île isolée. Les citoyens circulent, pour le travail, pour les loisirs, avec leurs problèmes de santé.
Les professionnels de santé eux aussi sont mobiles, et beaucoup de professionnels d’autres pays exercent en France. A l’inverse, des professionnels de santé français exercent ailleurs en Europe et dans le monde.
Les agents microbiens ou chimiques qui comportent un risque pour la santé circulent très largement dans le monde, ignorant les frontières, tout comme les événements climatiques et environnementaux.
Les produits de santé qui sont utilisés et prescrits en France, médicaments et matériel médical, sont produits partout dans le monde, ou certains de leurs composants le sont.
Les régulations qui s’appliquent aux produits de santé, aux actes des professionnels, aux formations et diplômes, sont de plus en plus harmonisées voir communes, au moins en Europe.
La connaissance scientifique sur la santé est partagée mondialement.
La France est représentée et active dans les organisations internationales qui s’occupent de santé, qu’il s’agisse des agences de Nations Unies (OMS en particulier), de l’Union Européenne (Direction Générale Santé de la Commission Européenne, Agence Européenne du médicament, Centre Européen de Contrôle des Maladies ou ECDC, etc.) et enfin des ONG où la France est partie prenante (MSF, MDM, Croix Rouge, etc.).
En parallèle, les industries dont les produits peuvent comporter des risques secondaires pour la santé (chimie, énergie, alimentation, boissons, drogues et tabac et alcool, etc.) sont en général de taille supra nationales, avec des chiffres d’affaire qui souvent dépassent largement ceux des Etats qui doivent les réguler. Leur gouvernance est peu influencée par des considérations sociales ou sanitaires “locales”, c’est à dire nationales.
Et pourtant les programmes de santé des candidats à la présidence, lorsqu’ils en ont, évoquent rarement l’international, comme si nous vivions en autarcie, autosuffisants, souverains, surtout en matière de santé.
Il est temps de parler de santé en prenant en compte des niveaux d’intervention adaptés à chaque enjeu.
L’échelon local est celui de l’épreuve de vérité pour les systèmes de santé face aux citoyens, en prise directe sur leurs problèmes. L’échelon local est aussi celui où nous pouvons créer des environnements favorables à la santé et lutter contre les inégalités.
L’échelon régional est celui de la gouvernance à une échelle compatible avec des spécificités de contextes sociaux, économiques, géographiques, culturels.
L’échelon national est celui qui permet de mettre en place une véritable gouvernance pour défendre des valeurs, des contrôles de qualité, des ajustements de solidarité. C’est également l’échelon où doit s’exercer ka volonté politique affirmée pour que notre pays négocie à l’international la place de ces valeurs et accepte enfin de jouer enfin un rôle de partenaire. Loin des postures, il est temps de développer une stratégie ouverte pour faire alliance en dehors de nos frontières dans l’intérêt général.
Alors, l’action internationale permet de s’insérer dans un mouvement inéluctable et non réversible de survie dans un monde de la santé qui est devenu, comme le dit l’OMS, “un village mondial”.
En Europe, nos partenaires, les pays de l’Union Européenne, ne se résument pas à l’Allemagne ou la Grande Bretagne. Les autres pays, même plus petits, même moins dotés, ont beaucoup à nous apprendre en matière de solidarité et efficience du système de santé, de décentralisation, de prise en charge des soins de suite et des handicaps, d’adaptation des systèmes de santé à une relative pénurie, de déplacement des soins de l’hôpital à la ville, de mobilisation de la société civile… Il est possible qu’ils soient moins performants parfois en innovation technologique. Là où nous rêvons de faire aussi bien que les USA en matière de technicité, ils nous montrent comment faire mieux peut-être sur les inégalités sociales de santé. Ils nous montrent aussi parfois qu’il est possible de réformer sans crise, d’expérimenter sans craindre de se tromper… La veille et le benchmark sont essentiels, à travers en particulier des outils déjà disponibles et développés par bon nombre d’institutions internationales. A l’inverse, la plupart des voyages d’études des quelques responsables politiques pour “aller voir”, sur la base d’effets de mode, ne produisent pas les résultats escomptés.
La France de la santé doit jouer son rôle dans les institutions européennes avec sérieux.
Au Conseil des ministres européens de la santé, nos ministres de la santé se doivent à plus de présence d’une part, et plus de transparence sur ce qui s’y discute, sur les positions adoptées, sur le suivi des décisions.
A la Commission européenne, nos représentants officiels se doivent aussi à plus de transparence sur leur travail, sur leur préparation des dossiers, sur les experts consultés, sur les positions adoptées, sur le suivi des décisions, règlements, directives et autres actions.
Au Parlement européen, la présence et la participation des élus aux groupes de travail et comités divers à Bruxelles, ainsi que leur présence en sessions plénières à Strasbourg, devrait faire l’objet d’un tableau de bord public. Les contacts des élus avec les représentant de tous les lobbys devrait être rendu transparent.
Bref, il est temps de s’organiser pour que le travail soit fait en amont de façon sérieuse autour des enjeux et de l’analyse des dossiers, en ensuite en aval sur le suivi de la mise en oeuvre des décisions réglementaires et techniques.
Dans les institutions multilatérales qui s’occupent de santé, il est temps d’introduire plus de stratégie dans la présence et l’influence de la France. Le financement n’est pas le seul outil d’influence. Et la représentation de plus en plus fréquente par les seuls diplomates professionnels même lorsque les enjeux sont techniques n’est pas stratégiquement efficiente.
La mobilisation de l’expertise française pour l’action internationale doit aussi faire la part de ce qui vise à aider des pays en grande difficulté, de ce qui vise à instituer des partenariats de collaboration pour le développement avec des pays ou institutions partenaires, et enfin de ce qui procède d’action commerciales de valorisation de l’expertise française dans un contexte compétitif de “prestations”.
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