En novembre dernier, dans un contexte de crise d'Ebola encore très active et sans visibilité sur une "sortie immédiate", j'ai préparé un éditorial pour la revue Santé Publique. J'y exprimais les critiques de nombreux professionnels de santé publique, souvent des experts liés aux institutions européennes, sur le format de la réponse à cette crise, qui se sont exprimés en particulier lors du colloque des sociétés européennes de santé publique à Glasgow (EUPHA). Et je mettais en avant leurs suggestions :
- d'une part moins se préoccuper de "notre nombril" et ne pas penser uniquement à protéger nos territoires nationaux et nos citoyens.
- d'autre part mettre les moyens nécessaires sur place, au coeur de la crise, mais plus pour soutenir les professionnels et institutions locales, mêmes déficientes, plutôt que d'exporter de l'expert et des institutions clefs en main, avec difficulté d'ailleurs. L'un et l'autre sont utiles, mais l'un sans l'autre n'a pas de pérennité ni de réactivité suffisante.
Les aléas de l'édition d'une revue trimestrielle font que mon éditorial vient de sortir, alors que l'on peut maintenant espérer sans rêver que cette crise là est derrière nous. Mais l'article reste d'actualité, car il exprime deux points qui restent essentiels (Editorial Santé Publique):
- la logistique de soutien local, l'envoi de matériel de protection et de support technique destinés aux institutions et professionnels localement ont été mis en oeuvre par les agences de coopération et les opérateurs internationaux, en particulier la commission européenne. Les optimistes diront que les professionnels ont été entendus, les pessimistes que leurs avis n'ont rien changé, tout était déjà en route avec un peu de lenteur... Les évaluations à venir, espérons qu'il y en aura, nous préciseront peut-être l'impact des diverses interventions et mesures en réaction à l'épidémie. Un rapport récent de l'OMS fait la chronologie des événements de cette dernière année... pas une évaluation, mais ça mérite la lecture : "One year report"
- la nécessaire refonte des systèmes de santé, car les pays voisins, même pas très soutenus car pas "zone d'intervention", même assez pauvres parfois et/ou en difficultés diverses (Côte d'Ivoire, Nigéria, Mali, Sénégal), ont des systèmes de santé limités mais existants et ils ont résisté à la diffusion de l'Epidémie.
Il est donc temps que l'aide internationale, celle de nos services de coopération, se concentrer enfin sur le renforcement des systèmes de santé locaux et plus uniquement sur des problèmes de santé importants mais "verticaux" et spécifiques (tuberculose, paludisme, VIH, etc.). L'un ne va pas sans l'autre là aussi, et l'OMS le clame depuis plus de 15 ans maintenant, avec peu d'écho. Ca a fait l'objet d'un meeting spécifique sur Ebola et les systèmes de santé à l'OMS : "Resilient Health Systems"
Bonne lecture de mon éditorial et soyons prêts pour la prochaine crise du genre !
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