Une histoire un peu banale, une jeune femme de 21 ans, sujette à des malaises, crises d’angoisses, palpitations… Elle conduit sur l’autoroute qui mène à la maison de campagne, avec mes deux filles comme passagères. Elle se sent mal, s’arrête sur le bas côté et ne peut repartir.
Appel du 18, explication au téléphone, les pompiers arrivent, à 5 ou 6 ! Est-ce une réaction standard, systématiquement en groupes de taille fixe, ou problème de régulation et de compréhension de la situation (ma fille la plus âgée, étudiante sage-femme, sait à peu près expliquer une telle situation) ? Ils sont accompagnés de policiers…
Les pompiers embarquent la jeune « malade », demandent à ma fille de les accompagner… et les policiers annoncent que ma plus jeune fille, 17 ans, va rester dans la voiture, au bord de l’autoroute, seule… Elle n’a qu’à appeler quelqu’un ! C’est ce qu’on appelle de la prévention !! Le manuel de la création des accidents ou des conditions favorables à une agression.
Ma fille aînée refuse, dit qu’elle va alors rester, mais le problème est qu’elle n’a pas le permis… Donc dilemme, vont-ils laisser deux jeunes fille sur le bord de l’autoroute, dans un voiture sans conducteur ? Les pompiers insistent, on embarque tout le monde, un policier conduit la voiture jusqu’à l’hôpital… Ouf, fin du premier épisode, sans dommage mais un peu en grognant « on est pas là pour faire de la garderie ! ».
Deuxième épisode : Urgences d’un hôpital général d’Ile-de-France. On fait passer la jeune femme du malaise en salle d’examen… et plus de nouvelles pour mes filles. Elles demandent, on leur dit qu’elles n’ont qu’à lui téléphoner. C’est là que nos filles nous appellent, déjà au lit pour moi… Venez nous chercher.
Vers 1heure du matin, nous arrivons à l’entrée de la salle « accompagnants », difficile de faire plus glauque (et pourtant j’en ai visité quelques unes…). 10 à 15 m2, peinture défraichie, néons un peu sombres… Distributeurs de boissons « HS », distributeur de café « HS », pas de fontaine d’eau.
A l’accueil, une dame peu souriante (vous l’aurez compris, le « peu » est diplomatique). C’est pour quoi ? Madame, je suis le père de ces deux jeunes filles qui ont accompagné leur amie, je suis médecin et je viens rechercher mes filles et voir où en est la jeune femme malade. Je lui crée un petit stress, pas trop, très léger, mais elle dit « ah oui », je vais aller voir… La dame revient 15 minutes après pour faire le dossier (pas fait avant…) et nous annonce au bout de 30 minutes que notre protégée est avec le médecin. Par SMS, elle nous dit qu’on lui fait un ECG (électrocardiogramme, pour les analphabètes des acronymes médicaux).
La jeune « malade » sort 20 minutes après par la porte du sas des urgences, seule, personne ne vérifie si elle est avec quelqu’un pour rentrer chez elle… Et pas un mot de l’accueil, vide, personne pour lui dire au revoir… Le message de l’interne qui l’a vue : vous verrez avec le médecin qui vous accompagne. Ca gêne, visiblement : un médecin est avec vous, il n’a qu’à lire la lettre de sortie. Merci pour le contact confraternel !!
Le directeur est au courant pour l’état de la pièce d’accueil ? Le chef de service aussi ? Comment sont leurs bureaux, dans le même état ? Pas sur, pas partout en tous cas… Est-ce volontaire, pour être sur que tout le monde puisse constater la pauvreté de l’hôpital ?
Et l’accueil, qu’en dire ? A l’heure où la plupart des organismes publics ont travaillé le sujet, souvent formé leurs personnels, et procèdent à des enregistrement des lieux d’accueil et des échanges… il ne restera plus que les urgences, avec le stress incroyable de ceux qui viennent demander de l’aide, pour continuer à maltraiter les visiteurs ? Et Il ne suffit pas de raconter des histoires de maltraitance de professionnels de santé par des malades ou leurs familles, réelles et inacceptables, pour gommer cette maltraitance là, de professionnels à usagers.
Mais ne vous inquiétez pas, ça ne m’a pas stressé, juste fatigué et désolé. Car le boulot est fait, et il ne manque pas grand-chose pour lui redonner de la grandeur. Un peu de responsabilité de ceux qui ont la charge de ces services, administratifs comme professionnels… Car on le sait, le chef compte pour beaucoup dans tout ça. Inutile d’attendre que le ministère fasse tout. Ca ne viendra pas.
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