En matière d'évaluation de gestion publique d'une crise, de pilotage d'une "info publique", de prévention au sens large, d'implication des établissements de santé et des médecins, la grippe A a offert un champ de travail futur formidable.
Dommage... Notre ministère de la santé, avec l'aval du gouvernement dans son ensemble, a probablement fait un sans faute dans la reconnaissance d'une urgence sanitaire mondiale et dans la mobilisation politique et institutionnelles amenant à considérer qu'il fallait des mesures d'exception avant même de "tout savoir".
C'est au moment de la mise en oeuvre des actions nécessaires que les couacs sont apparus. Certes, c'est la première fois, tout le monde apprend et il y a toujours des erreurs... qu'on ne refait pas la fois suivante ?
Mais on doit tout de même s'interroger sur l'origine des décisions lorsqu'elles sont incompréhensibles pour la majorité des "experts" du secteur : notre système de santé est ce qu'il est, mais il a une histoire, basée sur un maillage du territoire et une mise en oeuvre des actions de soins et de préventions qui repose sur des acteurs bien identifiés, dont les médecins : à l'hôpital et en ville, publics et privés, et sur des médecins dit de premier recours, de statut "privé" pour l'essentiel, généralistes, pédiatres... Ce sont eux qui sont devenus il y a peu de temps médecins référents, c'est à dire points d'entrée obligés du système de soins.
Rappelons que ce système de soins, pour imparfait qu'il soit, est considéré dans le monde comme un des meilleurs qui soit (comparaisons OMS). Et pourtant, nos décideurs de la santé ont choisi de mettre en oeuvre une vaccination de la population française en se passant des services des ces professionnels. On connait la suite : L'objectif vaccinal d'atteindre toute la population est loin d'être atteint, malgré le recours à des opérations quasi militaires de réquisitions de professionnels... De 3 à 4 millions de personnes vaccinées à ce jour à l'utilisation des 94 millions de doses achetées, il y a un pas qui ne sera sans doute jamais franchi. Et aussi une vraie fronde du monde des professionnels de santé, maladroite sans doute car porteuse de confusion dans les messages, mais témoin d'un manque de dialogue avec eux en amont.
Ce choix demandera des explications claires :
- Est-ce pour éviter le cout du recours aux services des professionnels de santé libéraux, facturés à la sécurité sociale pour chaque acte ? Mais il faudra démontrer que le choix qui a été fait a été source d'économie, à défaut d'être source d'efficacité... Et que dire en regard du cout des 94 millions de doses vaccinales achetées : la moitié aurait surement fait l'affaire.
- Est-ce pour des considérations de compétence ? Pourtant ce sont bien ces mêmes professionnels qui vaccinent l'essentiel de la population française pour les autres maladies, sans que cela soit remis en cause de façon sérieuse.
Ces questions en appellent une autre : nos politiques sont montrés du doigt et payeront peut-être leurs mauvais choix, mais il serait bien de savoir QUI LES A CONSEILLES ?
L'expertise mobilisée en amont d'une décision reste toujours dans l'ombre. Les conseillers sont rarement signataires officiellement et de façon transparente de leurs conseils et amenés a assumer pleinement leurs erreurs. Ils peuvent donc recommencer encore et toujours sans être remis en cause.
Ce type de "crise" devraient conduire à ouvrir plus clairement et plus ouvertement un chantier sur l'expertise, en matière de transparence, de responsabilité mais aussi sa contrepartie, la reconnaissance.
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